Anthony Bonin : Des chantiers à la forêt, une reconversion en quête de sérénité

Après une carrière en tant que menuisier-charpentier, Anthony Bonin a décidé, à 32 ans, de changer radicalement de vie. Fatigué du rythme effréné de la ville et en quête d’un environnement plus apaisant, il a entamé une reconversion vers un métier en pleine nature.

Quand Anthony Bonin termine son secondaire, il n’a pas de vocation précise. Souhaitant mettre à profit le temps de trouver sa voie, il accepte de continuer à travailler dans le petit restaurant où il officiait en plus de l’école. Après quelques années dans la restauration, il se rappelle finalement des jours heureux passés aux côtés de son grand-père, menuisier. Une véritable inspiration pour le jeune homme : « J’aimais beaucoup les travaux manuels, et j’ai compris que c’était un domaine qui me plaisait ».  

À 19 ans, il entame donc un DEP en menuiserie-charpenterie au centre de formation Le Chantier, à Laval. Une fois son diplôme en poche, il se lance rapidement dans le métier. Travaux de rénovation, pose de portes et fenêtres, revêtements d’aluminium… Il enchaîne les expériences et développe ses compétences, mais malgré la satisfaction du travail bien fait, quelque chose cloche. Il le ressent au plus profond de lui-même.  

Les longues journées sur les chantiers, combinées aux trajets éreintants entre son domicile et l’île de Montréal, le pèsent. « Pour être au travail à l’heure, je devais partir à 4 h 30 du matin en espérant éviter le trafic. Petit à petit, ça m’a usé. J’étouffais sans vraiment comprendre pourquoi. »  

L’épuisement et la remise en question  

Pendant des années, Anthony tente de s’adapter et de passer outre ce mal-être. Il déménage à Repentigny pour se rapprocher de son entreprise, mais la fatigue ne disparaît pas. « Je voyais un médecin et un psychologue, mais je ne trouvais pas de réponse. J’avais l’impression d’être un robot, d’avancer sans vraiment être heureux. »  

Malgré tout, sa thérapeute met enfin le doigt sur le problème : ce n’est pas son métier qui l’épuise, mais la ville et son rythme. Trop rapide, trop bruyante, trop étouffante. « J’ai compris que j’étais hypersensible et que je n’étais tout simplement pas fait pour ce mode de vie. Il me fallait autre chose et vite ».

 

Le déclic : un retour à la nature  

C’est un changement dans la vie familiale qui crée le déclic. Sa mère et son beau-père s’installent à Saint-Alphonse-Rodriguez, et Anthony, toujours prêt à rendre service et souhaitant prendre du temps pour lui, se rend régulièrement chez eux pour contribuer aux rénovations du chalet. Il réalise alors que, loin de la ville, il se sent mieux et commence à revivre. Il confie : « Chaque fois que j’étais au bord d’un lac ou en pleine forêt, je me sentais paisible. Sans klaxon, sans sirène d’ambulance… J’ai compris que c’était de ça dont j’avais besoin. »  

Comme un signe du destin, il tombe sur une publicité Facebook pour le DEP en Protection et exploitation de territoires fauniques du Centre de formation professionnelle de Mont-Laurier. Pour être certain de faire le bon choix, il décide alors de tenter le programme « Élève d’un jour » pour s’immerger, le temps d’une journée, dans les cours. « Quand je suis arrivé, j’ai tout de suite su que c’était ma place. On parlait de mammifères, d’oiseaux, on était dehors… J’étais exactement là où je devais être. »  

Un nouveau départ à 32 ans  

En août 2024, Anthony prend une décision radicale : il range toutes ses affaires dans un entrepôt, loue une chambre en résidence étudiante et se lance dans cette nouvelle aventure. « Ça ne me faisait finalement pas si peur que ça. Mon père l’avait fait à quarante ans, alors pourquoi pas moi ? Reprendre l’école à mon âge n’était pas un échec, mais une chance. »  

Autre point positif pour le jeune homme à la motivation sans faille, une intégration rapide et facile malgré la différence d’âge avec certains camarades. « Au final, dans chaque classe, il y a toujours des adultes en reconversion. Moi aussi, à 19 ans, j’avais des collègues plus vieux et ça me semblait normal. J’ai donc vite trouvé ma place. »  

Au fil des mois, il découvre un univers qui lui correspond : aménagement forestier, entretien des sentiers, gestion des habitats naturels… Il réalise même à quel point ses compétences manuelles sont un atout. « Les enseignants me disent souvent qu’un gars avec un bagage en menuiserie, c’est recherché dans les parcs et les pourvoiries. »  

Un choix enfin reconnu et assumé  

Aujourd’hui, Anthony Bonin se prépare à son premier stage à la Réserve faunique Rouge-Matawin, gérée par la SEPAQ. Il envisage de travailler dans des parcs nationaux, sur l’entretien des chalets et des sentiers, ou encore de participer à des opérations de préservation de la faune.  

Et son parcours inspire : en mars 2025, il a en effet reçu un prix de persévérance lors de la Semaine des adultes en formation. Une reconnaissance qui le touche particulièrement : « C’est une belle fierté. Ça prouve que j’ai fait le bon choix. »  

Et surtout, il a retrouvé ce qu’il cherchait depuis des années : la sérénité. « Quand je retourne voir mes anciens collègues sur les chantiers et qu’ils me parlent du boulot, je me rends compte que ça ne me manque pas du tout. Je suis exactement là où je dois être. »  

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Haute Laurentides

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